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Lalibela et les églises du Tigray

de Patrick

La cité monastique de Lalibela et les églises rupestres du Tigray

 

Depuis notre dernier voyage il y a dix ans, la population éthiopienne a doublé… Avec 111 millions d’habitants, ils sont devenus le deuxième pays d’Afrique le plus peuplé. Malgré un taux de croissance toujours élevé, environ 11%, l’Éthiopie reste un pays pauvre, essentiellement agricole, tributaire des sécheresses successives. Un évènement politique et médiatique a placé l’Éthiopie sur la scène internationale: le nouveau premier ministre, Abiy Ahmed, nommé en avril 2018, a reçu le prix Nobel de la paix 2019, entre autres pour ses actions ayant conduit à la résolution du conflit entre l’Éthiopie et l’Érythrée.

 

Bienvenue en pays Amhara

Addis Abeba, Debre Berhan, col de Bwahit, Kemise

Ethiopie marathonNotre voyage commence à l’agence locale « Bella Abyssinia » où Jonas le directeur détaille notre programme de 23 jours en nous montrant les étapes sur une carte. Nous rencontrons également Bakri, notre jeune guide de 23 ans. Toujours à l’agence pour gagner du temps, nous changeons des Euros en Birrs (1 €= 33 Birrs) pour nos dépenses pendant le voyage, et nous voilà partis! Nous nous répartissons dans trois 4×4, faisons connaissance de nos chauffeurs Habte, Meles et Zed et filons en direction du nord-est jusqu’à la ville de Kemise, située dans l’Oromia en région Amhara.

Ethiopie InjeraNous prenons cette belle route qui traverse les hauts plateaux éthiopiens entre 2600m et 4000m. C’est aussi le terrain de jeu des coureurs éthiopiens, champions incontestés des marathons avec les Kényans. Leur très longue foulée en dit long sur leur niveau. Peu avant midi, nous nous arrêtons dans un très bon restau à Debre Berhan et dégustons le plat national l’injera. C’est une galette de teff (céréale éthiopienne), recouverte de divers légumes et sauces, servie dans un grand plat typique en osier. Nous terminons le repas par l’incontournable café éthiopien.

 

geladaC’est maintenant reparti pour quatre bonnes heures de route. Nous montons jusqu’au col de Bwahit (4300m) où nous observons les Géladas, primates ressemblant aux babouins. Le Gélada est endémique de l’Éthiopie, et bien reconnaissable avec ses taches roses de peau nue se rejoignant au milieu de la poitrine, faisant penser à un sablier. Il y a de nombreuses familles à tous les étages de la falaise, quel beau spectacle! La longue descente qui fait suite serpente dans de somptueux paysages de cultures de blé, sorgho, teff, …

geladaLa lumière décline et la route est maintenant partagée avec les troupeaux, que des hommes, ou le plus souvent des enfants, ramènent à la maison. Les femmes, véritables tâcheronnes, marchent le long de la route, avec un chargement de bois ou d’eau sur le dos. Les voitures klaxonnent, slaloment entre les zébus, les ânes, les chèvres et quelques dromadaires, évitant les cratères qui trouent la route. Nos chauffeurs, Habte, Zed et Meles ont l’habitude. Quand on leur demande s’ils sont fatigués par l’attention que nécessite la conduite, ils disent que non, c’est comme cela l’Éthiopie… Nous arrivons à notre hôtel. Au menu ce soir, injera avec une sauce aux haricots, appelée kucho. Le patron sert très généreusement de cette sauce bien relevée. Manger avec les mains sans s’en mettre partout relève pour nous de l’exploit!!!

 

 

Une longue journée de voiture

Kombolcha, Dessie, lac Hayq, Wuchale, Mersa, Weldiya, Lalibela

EthiopieIl est 5h quand l’appel du muezzin nous réveille. Après un petit déjeuner qui s’éternise, nous reprenons la route en direction de Kombolcha puis Dessie. C’est l’heure de conduire les animaux aux champs, il y a donc beaucoup de monde le long de la route. Une fillette de 4 ou 5 ans porte son petit frère ou sœur sur le dos… pas besoin de poupée !!! Nous faisons une pause au lac Hayq. Les hommes visitent le monastère Saint-Étienne de Hayq, interdit aux femmes. Avec Marie, nous allons faire un tour au-dessus du lac espérant pouvoir s’en approcher, ce qui n’est pas gagné. Nous trouvons finalement un petit passage le long d’une maison qui àlac Hayq travers les terrasses nous conduit au bord du lac. Un homme navigue à bord d’un paddle traditionnel, deux jeunes filles font la lessive, tandis qu’un jeune garçon conduit son troupeau de zébus boire dans le lac. Beaux moments du quotidien.

Nous reprenons la route vers Wuchale, Mersa. Nous voyons de nombreuses personnes courir dans tous les sens et regarder dans le ciel. Nous interrogeons en anglais Meles, notre chauffeur, pour comprendre ce qui se passe. Il nous parle de «Grasshoper» ce qui ne nous renseigne pas beaucoup, avant de comprendre et de voir qu’il s’agit d’un gros nuage de sauterelles, plus exactement de criquets pèlerins. C’est la panique générale, les camions klaxonnent, nuage de criquets pèlerinles gens secouent des bouteilles plastiques dans lesquelles ils ont mis des cailloux, afin de faire un maximum de bruit pour faire fuir les criquets et éviter qu’ils ne se posent. Si le nuage se pose, en quelques instants, les cultures sont détruites et les gens perdent toute leur récolte. Ce fléau s’est déjà produit il y a une vingtaine d’années et c’est seulement un largage de pesticides à grande échelle qui les avait éradiqués. Nous assistons impuissants à un grand désarroi de la population.

Nous prenons le repas à Weldiya. Nous nous régalons d’injera au bœuf. D’après le GPS de Philippe, nous n’avons parcouru que 190 km alors que nous en avons 370 au total. Nous ne sommes pas rendus à Lalibela! La route est de moins en moins bonne, puis devient une piste s’élevant en montagne. Nous faisons quelques arrêts pour distribuer des vêtements, Ethiopiecahiers, crayons, ballons, bonbons aux gens marchant le long de la route. Les larges sourires que l’on nous renvoie nous font chaud au cœur.

Cette région est riche en culture : teff, blé, orge, sorgho, kat, goyave, papaye, mangue, canne à sucre… Le temps tourne au gris, le paysage devient plus accidenté. Il est trop tard pour visiter l’église que nous avions prévue sur notre chemin. En effet, nous arrivons à Lalibela vers 18h30 et la nuit est déjà tombée. Nous nous installons à Harbe hôtel pour deux nuits. Bel hôtel dans un des lieux les plus visités d’Éthiopie. Un bon repas nous attend : soupe de champignons, plat de poisson accompagné de choux, d’épinards et de pommes de terre grillées. Nous tentons un vin local appelé Acacia, mais il est trop sucré, c’est le soft. Nous testerons quelques jours plus tard le dry, qui est bien meilleur.

 

 

lalibelaLalibela, haut lieu du christianisme éthiopien

Un grand ciel bleu et une température douce nous attendent au lever. Après un bon p’tit déj, nous partons pour la visite des nombreuses églises. Lalibela est un haut lieu du christianisme éthiopien, lieu de pèlerinage et de dévotion. C’est dimanche et de nombreux pèlerins, vêtus de blanc, convergent vers les sites religieux. Nous visitons un musée où sont exposés de beaux objets religieux: parures, manuscrits, instruments de musique, peintures…

lalibelaKissaye, guide francophone, nous fait découvrir le site de Lalibela, qui compte onze églises médiévales monolithiques; ces dernières ont été creusées dans la roche. Leur construction est attribuée au roi Lalibela qui, au XIIe siècle, entreprit de construire une « Nouvelle Jérusalem » après que les conquêtes musulmanes eurent mis un terme aux pèlerinages chrétiens en Terre sainte. D’après la légende, il reçut la mission divine d’édifier une église d’une seule pierre. Les archanges qui remplaçaient les ouvriers la nuit lui vinrent en aide et ainsi, la construction n’aurait pris que quelques jours !!! On distingue deux groupes principaux d’églises, d’abord au nord du fleuve Jourdain:

 

  • blog lalibelaBiete Medhani Alem ( la maison du Sauveur du monde ), considérée comme la plus vaste église monolithique au monde, elle impressionne par ses dimensions, ses 34 piliers robustes rectangulaires forment une colonnade autour de l’édifice. L’intérieur comprend 3 nefs séparées par 38 piliers supportant des arcs. Le dimanche, les fidèles affluent pour être bénis ou guéris par la célèbre croix en or de Lalibela qui pèse 7 kg.
  • Biete Mariam ( la maison de Marie ), de taille modeste, mais avec 3 porches d’entrée et une très belle décoration intérieure. Le mur Est arbore 2 séries de 3 fenêtres, celle du haut symboliserait la Sainte Trinité, les autres, le Christ au centre sous une ouverture cruciforme, le bon larron à droite sous une ouverture indiquant l’accès au paradis et le mauvais larron à gauche au-dessus d’une ouverture désignant l’enfer. lalibelaLe porche de la façade est surmonté d’un beau bas-relief représentant 2 cavaliers terrassant un dragon. De superbes motifs sculptés couvrent les colonnes, les chapiteaux et les arches. Parmi eux figurent un aigle bicéphale et deux taureaux s’affrontant.
  • Biete Maskal ( la maison de la Croix ), petite chapelle semi-monolithique creusée dans le mur nord de la cour de Biete Mariam.
  • Biete Denagel ( la maison des vierges ), chapelle troglodytique.
  • Biete Golgotha Mikael ( la maison de Golgotha-Mikael ), ce sont en fait 2 églises jumelles renfermant les seuls piliers cruciformes de Lalibela, Biete Golgotha, interdite aux femmes contient les 12 apôtres grandeur nature sculptés dans des niches murales dont 4 sont visibles, les autres étant dissimulés derrière un rideau, Biete Mikael est décorée de nombreuses croix sculptées.

Ensuite, au sud du fleuve Jourdain:lalibela

  • Biete Amanuel ( la maison d’Emmanuel ), église entièrement monolithique qui possède les façades les plus travaillées.
  • Biete Qeddus Mercoreos ( la maison de saint Mercorius ), les fers et autres objets laissent penser que cette église a pu servir de prison. La Passion du Christ peinte sur une toile de coton date probablement du XVIe siècle. L’étroit tunnel de 35 m de long, noir comme un four, menant à l’église symbolise l’enfer. Nous n’échappons pas à la tradition locale qui veut qu’on le parcoure sans aucune source de lumière !
  • Biete Abba Libanos ( la maison de l’abbé Libanos ) se distingue des autres églises de Lalibela, car elle reste attachée à la paroi rocheuse par le toit.
  • blog lalibelaBiete Gabriel Rafael ( la maison de Gabriel-Raphaël ), cette double église imposante marque l’accès principal du groupe sud-est, on y pénètre par le haut via une petite passerelle enjambant une haute tranchée telle une douve.
  • Biete Lehem ( la maison du saint Pain ) est considérée à tort comme une église, il s’agit en fait d’une tour donjon.
  • Biete Ghiorgis ( la maison de Saint George ) est séparée des autres, auxquelles elle est cependant reliée par un système de tranchées. La roche a été découpée et a laissé la place à une croix de 12m sur 12m ne nécessitant pas de piliers intérieurs.  La lumière qui filtre à travers les fenêtres éclaire les grandes croix du plafond; beauté rime avec sobriété. Des cavités dans les murs entourant l’église contiennent des corps momifiés.

Les églises de Lalibela n’ont pas été édifiées de manière traditionnelle, mais creusées dans la roche en blocs monolithiques. Dans ces blocs, on a ensuite dégagé des portes, des fenêtres, des colonnes, différents étages, des toits … Ce travail de titan a ensuite été complété par un vaste système de fossés de drainage, de tranchées et de passages pour les processions avec, parfois, des ouvertures vers des grottes d’ermites ou des catacombes. Il y a 3 types d’édifices : les églises troglodytes, les semi-monolithiques et les monolithiques. On se déchausse avant d’entrer dans chaque édifice. Même si, malheureusement, les édifices de Lalibela sont fragilisés par l’érosion et les eaux de pluie, le lieu est exceptionnel. En effet, ces églises ont toutes quelque chose d’unique par leur exécution, par leur taille ainsi que par la variété de leur forme.

 

 

Tigray, changement de décor

Sokhota, Mekele

blog ethiopieUne très longue journée de voiture nous attend. Nous faisons la pause déjeuner à Sokhota et goûtons au « shekla tibs », agneau grillé maintenu chaud dans un petit poêlon sous lequel on met des braises. Les tibs sont différents plats à base de viande coupée en petits morceaux (fir fir). La viande est suspendue au fond de l’échoppe, les chambres froides, connais pas! Elle est découpée en fines lamelles, un couteau dans chaque main, vaut mieux bien maîtriser!  La viande est bien cuite et nous nous régalons. La piste que nous empruntons de Sokhota à Mekele est magnifique et elle nous fait un peu oublier les heures passées dans le 4×4.

blog ethiopieLes paysages sont de plus en plus arides, et les cultures de plus en plus rares. Nous faisons différents arrêts pour distribuer des vêtements aux gens le long de la piste. C’est difficile, car au début il y a une ou deux personnes, puis c’est tout le village qui arrive et les enfants se battent pour avoir quelque chose. Habte a une certaine autorité et il fait la distribution entre les villageois. Nous arrivons vers 18h30 à Mekele et nous nous installons pour deux nuits à l’hôtel Hatsey Johannes. Mekele, capitale de la région du Tigray est la  2e ou 3e plus grande ville d’Éthiopie avec environ 220 000 habitants. C’est une ville universitaire en pleine expansion.

 

 

Les incroyables églises rupestres du Tigray

église tigrayDépart vers 9h pour la visite de l’église Maryam Korkor ou Debre Maryam Korkor située dans le Tigray, dans la chaîne du Gheralta, à proximité de Wukro. C’est l’une des plus grandes églises rupestres de la région. Cette église à la façade verte en forme de croix dissimule des éléments architecturaux intéressants tels que des piliers cruciformes, des arches et des coupoles recouvertes de fresques du 17e siècle. Elle se situe à quelques centaines de mètres d’un autre édifice religieux, Daniel Korkor creusé dans la roche au bord d’un précipice. L’accès à ces églises troglodytes se fait via une randonnée sportive d’environ 1h30, alternant sentier et paroi rocheuseEglise Tigray dans un décor digne de l’Ouest américain avec des vues imprenables sur le massif du Gheralta.

Cela fait du bien de faire un peu de sport après ces quelques jours de 4×4, et qui plus est dans un décor grandiose. On en prend donc plein les yeux et les photos sont à la hauteur de nos espérances, malgré une lumière un peu dure. Nous redescendons par le même chemin, la prudence est de mise à différents endroits, Tigraymais les guides locaux sont là pour aider les moins aguerris. Nous avons bien mérité un bon plat de spaghetti aux légumes et nous allons boire un café dans une maison traditionnelle. La préparation du café incombe aux femmes. C’est une cérémonie soumise à de nombreux rites qui diffèrent selon les régions, les ethnies et les religions.

La préparation du café mérite le nom de rituel, voire de cérémonie religieuse, non seulement parce qu’on ne saurait l’abréger, mais aussi parce qu’il comporte des gestes et des éléments rituels : de l’herbe fraîchement coupée est répandue sur le sol pour apporter de la fraîcheur et le parfum de la nature, à proximité brûle de l’encens. TigrayL’hôte s’assied sur un tabouret devant un tout petit réchaud à charbon. Pour commencer, les grains de café sont torréfiés. Lorsque la fumée s’élève, l’invité l’attire vers lui, l’inspire profondément et exprime la joie procurée par le délicieux arôme. Les grains sont ensuite broyés dans un mortier à l’aide d’un pilon avant d’être infusés. Lorsque le café est finalement prêt, il est servi dans de minuscules tasses en porcelaine.

Juste à côté, deux femmes s’affairent autour d’un foyer à la préparation de galettes pour une fête. Nous avons droit à une dégustation avec le café. Sur le chemin du retour, la nuit commence à tomber. Les gens rentrent leur bétail, à pied, à vélo ou encore en charrette, mais bien entendu sans éclairage !!!

Le voyage en un coup d'oeil

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